Le trekking de la mort

Publié le par Jul H

572244171-c33516aa54-m.jpgIl y a désormais presque trois mois nous avons eu l’idée avec Adeline d’aller faire un trekking dans le parc du Cocuy, situé à l’est de San Gil (je vous renvois à l’article) où se trouvent de magnifiques glaciers dans un des plus beaux parcs naturels de Colombie (et ils sont nombreux).

L’idée nous paraissait intéressante pour commencer nos vacances sur une note sportive mais comme vous allez vous en rendre compte, ce trekking s’est très vite transformé dans une des pires expériences de montagne que j’ai connue, d’où son tendre nom de « trekking de la mort ».

 

La route de la mort Colombienne

 

Pour nous rendre dans le village d’El Cocuy, nous avons eu la formidable chance de prendre un bus type européen, grand et élancé. Ce que nous ne savions pas, c’est que la « route », nous menant là bas disparaissait au profit d’un chemin serpenté bordé d’un ravin très peu attrayant. Heureusement pour nous la nuit aidant, nous arrivions de moins à distinguer cette fosse naturelle dans laquelle chaque virages tentaient de nous précipiter, si ce ne sont les camions citernes ou autres kamikazes de la route.

 

Un bon départ

 

Préparant nos affaires avec entrain avec notre guide Rodrigo, nous avons accumulé de quoi tenir 5 jours comme initialement prévu, ainsi que le matériel usuel de trekking avec nuit à -20°c. Le hic, c’est que nous étions sûrs avec Adeline (et le somme encore) que l’ensemble du matos devait être porté par des mules…

Grossière erreur qui nous a bien fait sentir son poids dès le premier jour de marche le lendemain matin.

Rien de traumatisant en soit.

Juste le temps de s’acclimater et d’installer le campement après 3-4 heures de marches et une petite visite dans une grotte décorée d’une cascade naturelle.

 

Nous avons planté notre camp dans un décor alienesque, par là j’entends parsemé de Fraijelones, plantes centenaires qui ne croissent que d’un cm par an, et dont les feuilles plus anciennes forme leur tronc marron et creux, à peine surmonté de quelques feuilles.

 

Après un déjeuner de fortune, nous entreprenons de visiter les lieux, mais nous passons la moitié du temps à essayer de ne pas perdre nos chaussures dans la boue marécageuse des champs de fraijelones.

L’eau est d’une pureté incroyable et c’est un délice que de boire à même la rivière.

Les contrastes sont sublimes et la couleur incroyable.

Jusque là nous espérions un séjour du même acabit…ce qu’hélas la force des choses ne nous à pas permit.

 

Le début des emmerdes

 

Après une nuit agitée à lutter avec Adeline pour arriver à s’endormir dans nos tentes sans se foutre des coups de pieds, nous avons l’incroyable plaisir de nous réveiller avec la douceur moite d’une petite pluie fraîche comme on les aime…mais qui n’a fait qu’empirer par la suite sans jamais s’arrêter.

A 4800m à ce moment là, nous avons marché à peu près 6h pour atteindre notre campement, seulement accompagnés de la pluie, du brouillard et des fraijelones.

Montant côté après côté nous avons passé les 3 premières heures à essayer de voir la cime qui chaque fois disparaissaient derrière une autre montée, et ainsi de suite. Escargots trempés avec des affaires qui commençaient à peser le double de leur poids, nous avancions, bêtes de somme de fortune, nous sommes par je ne sais quel miracle arrivé à notre campement, avec un moral miné comme c’est pas possible.

Nous avons donc dormi à plus de 5000m à environ 500m de glaciers impressionnant mais définitivement pas attirants à cette heure avancée.

Notre campement se résumait à une grotte naturelle, dans laquelle nous avons pu enfin nous protéger de la pluie et nous reposer.

La perspective de passer 4 autres jours ainsi ne nous a pas spécialement réjouis.

Difficilement séchés et mort de froid, c’est une autre difficile nuit que nous avons passé là-bas.

 

Quand y’en a plus y’en a encore ?

 

Un maigre soleil, à peine plus gai qu’un pinson mort, et voilà que la pluie reprend au matin au moment même où nous nous apprêtons à marcher.

Nous entamons une montée qui semble dictée plus par l’intuition du guide que par quelque autre indice d’orientation. Nous découvrons que sa « carte » n’est autre que la carte touristique basique qu’ils donnent à l’entrée du parc. Très stylisée et d’une qualité très très douteuse.

Nous passons sur des roches impraticables, trempés, avec nos sacs à dos, et l’ascension prend des tours d’escalade plus que de randonnées.

Nous glissons, Adeline se pette plusieurs fois la gueule, moi difficilement mieux, nous passons sous des cascades, au cas où il resterait une parcelle de vêtement sec sur nous, et notre guide ne nous attend quasiment jamais.

Crevé nous faisons une halte dans une caverne naturelle mais cette putain de pluie et le froid ambiant ne nous remonte pas plus le moral.

La seule chose qui me fait tenir à ce moment du trekking est de penser à revoir ma douce, me blottir contre elle, et tendrement m’endormir à ses côtés…et la certitude de la proximité de cet évènement.

Je me répète mentalement la scène indéfiniment jusqu’à arriver à une place coincée entre deux falaises, où sincèrement je commençais à ne plus sentir ma moitié inférieur.

C’est ici que notre cher Rodrigo nous indique le sommet d’une des falaises en nous disant que le campement est là haut.

La falaise fait foutrement penser à de l’ardoise glissante comme jamais avec aussi peu de prises qu’un couvercle de plat Tupperware.

Je crois ne jamais avoir eu envie de tuer quelqu’un là maintenant tout de suite (ou alors ça remonte à quelques années) seul soucis : on avait encore besoin de lui.

 

Nous négocions un retour anticipé.

Fatigué, mort, ayant chacun perdu un ou deux kilos en l’espace de trois jours, Adeline et moi on veut juste se casser.

Nous décidons donc d’écourter le trekking…

Mais vous pensez bien, qu’au lieu d’écourter le chemin du retour, Rodrigo ne fait qu’ajouter la distance que nous devions faire le lendemain.

 

Putain…

 

Nous revoilà donc reparti pour un périple soit disant facile, longeant des corniches plongeantes sur la vallée, glissant dans des ruisseaux exploseur de cheville, Adeline se vautrant méchamment et explosant la majeur partie de son pantalon qui de toute manière ne devait plus trop la protégée de grand-chose.

 

Nous apercevons à peine le fond de la vallée de retour lorsque nous nous rendons compte que nous avons perdu Adeline.

 

Voyant une maison en bas de la vallée, et ne nous voyant plus devant, elle avait essayé de couper. Chemin la menant direct sur un précipice.

 

Heureusement pour nous Rodrigo l’a retrouvé avant le grand saut.

 

Pour ma part j’attendais, à peu prêt une heure, sur mon caillou, trempé, luttant pour ne pas devenir fou à cause de la pluie qui ne cessait de marteler ma capuche depuis deux jours, et toujours pensant à la couette, la chaleur humaine et la tendresse d’un repos mérité.

 

Je crois que c’est à ce moment là que j’ai cessé de sentir le haut du corps et les douleurs dans les épaules, les reins et la gueule gelée à souhait.

Seuls mes genoux me suppliaient qu’on les achève, surtout le droit qui définitivement pose problème.

 

La fin ?

 

Tous réunis dans une grande famille de bras cassés, nous avons pu, quelques heures plus tard, arrivés sains et sauf à une ferme construite en fraijelones.

 

Réchauffé comme on pouvait par un feu de merde, et une bouffe bouillante à souhait, nous reprenions quelque peu des couleurs.

 

Hélas, de retour du dîner nous ne découvrons plus le portable d’Adeline qui était posé sur son lit fait d’un matelas rudimentaire et de couvertures d’alpaca.

Ce n’est pas la foule qui se presse dans cette cabane qui laisse penser à un voleur à la tire de métro. Nous décidons donc d’attendre le lendemain matin pour tout retourner, sans succès.

Nos soupçons se portent sur le beau-frère de la dueña, un petit vieux qui est le seul que toute cette histoire fait marrer.

 

Rodrigo livre un combat de diplomatie psychologique pour le faire avoir mais cela reste vain. Le vieux continue à se marrer et la dueña se décompose chaque fois plus, elle-même convaincue que c’est son beau-frère mais ne souhaitant pas pour autant porter une accusation direct.

 

Je me félicite d’avoir gardé mon appareil photo lors du dîner.

 

Après deux heures et de mi de Cluedo des montagnes, Rodrigo et Adeline de plus en plus de mauvais poil, partent chercher des bourriques pendant que je reste surveiller les affaires.

 

La mule est bien de retour mais eux non.

 

Il faut dire qu’à ce moment là il s’est remis à flotter, et cette fois juste pour mon petit plaisir personnel.

Tout se passe bien jusqu’à ce que le petit vieux et sa mule pette un plomb et quitte le chemin pour prendre un raccourci à travers les fraijelones, la boue, sautant, courant dans tous les sens.

 

S’en suit une course poursuite dans la brume pour ne pas les perdre, courant plus que marchant en pente libre, je lutte pour rattraper la mule qui définitivement a pêter un câble avec tous ses zigzags.

 

Au final la mule gagne.

Mon genou perd.

 

C’est donc définitivement achevé que nous rentrons à El Cocuy, dans une dodge 79 rouge ( me demandez pas pourquoi certains mystères sont trop opaques pour un myope), où nous nous engueulons avec les gardiens du parcs qui ne veulent pas reconnaître notre statut d’étudiant et veulent nous faire payer le tarif étranger (+300% du prix) pour finalement nous prendre pour des résidents mais pas étudiants…logique quoi.

 

Rodrigo aussi essaye de nous extorquer plus de thune alors que nous avons déjà payé cher ce séjour et raccourci sa durée globale, donc faut vraiment pas déconner.

 

Dans le speed, harcelés pour la thune et moitié mort, nous sautons dans le premier bus pour nous casser de ce village et de ce parc, à ce qui paraît super beau en été (Décembre, Janvier) et pluvieux à mourir le reste de l’année –détail caché par notre cher guide-.

 

Advienne que pourra

 
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S
MON JULIEN JE SAIS PAS COMMENT TU FAIT MAIS T' ES UN SUR-HOMME !!!<br /> IMPRESSIONNANT PUISSANCE 10000 TOUT CE QUE JE LIS = C' EST PASSIONNANT !!! JE SUIS FIER ... TRES TROP FIER DE TOI !!! <br /> TU ECRIS DIVINEMENT BIEN !!! MAIS JE NE SUIS PAS TROP RASSURE ALORS VIVEMENT QUE TU REVIENNES CHEZ NOUS ....EN FRANCE !!! <br /> RETROUVER TA BIEN AIMéE !!!! <br /> ET TOUS TES AMIS !!!!<br /> ENORMES BISOUS ON PENSE TRES TROP FORT A TOI ....<br /> NOTRE HERO !<br /> <br /> A+ FRED....
Répondre
J
Hahaha Fred, c'est sûr que pour quelqu'un qui sort jamais de Panam ça doit paraître impressionnant jaja.Mais t'inquiète pas tout vas bien pour moi et je rentrerai effectivement en un seul morceau.A tuttiJH